Le roi du silence [Pv Arsène Lupin]

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Ne connaissant encore personne dans sa nouvelle vie, Paloma se rendit naturellement à la bibliothèque où les livres compenseraient sans aucune difficulté le manque de chaleur humaine.

Depuis, le décès de Renée, Paloma avait réussi grâce à Mr Ozu à récupérer une grande partie de la collection de livres de celle-ci et ensemble ils en avaient dévoré une grande partie. La passion qu'elle avait déjà pour la littérature et l'art s'accentua alors.

Cependant, ce jour-là, elle ne voulait pas lire. Toujours à la recherche des détails qui font la beauté des choses, elle y alla pour voir les gens lire et travailler. Les bibliothèque était des endroits tranquilles, pour elle qui amait par dessus tout le silence s'était un lieu privilégié. Elle prenait un certain temps à choisir divers livres sur divers sujets qui l'intéressaient, les posait sur une table où elle avait une vue dégagée sur une bonne partie de la bibliothèque, en ouvrait un ou deux au hasard, sortait de quoi noter et faisait mine de travailler durement de façon à ce que peu personne n'ait la subite idée de venir la déranger pour lui parler de choses souvent sans intérêt.

Ainsi, ce jour-là, elle fit de même. Suivant la même méthodologie qu'à son habitude, elle choisit quelques livres sur la photographie (un de ses sujets préférés sur lequel elle avait lu une multitude d'ouvrages), un livre sur l'histoire et un livre de Tolstoï (un des auteurs préférés de Mme Michel qu'elle avait du lire un millier de fois depuis sa mort) puis, elle se posa en face de l'entrée principale d'où elle pouvait voir les allants et les passants mais aussi les quelques personnes qui était assises à lire ou à écrire. Elle sortit son journal, celui où elle notait des pensées, qu'elle réinscrirait plus tard en fonctions de leur intérêt dans un autre carnet. Depuis l'âge de ses 13 ans elle avait pris cette habitude.

Deux personnes assises un peu plus loin chuchotaient le plus doucement possible en guettant que personne ne les regardaient, ce qui fit doucement sourire Paloma. Elle s'intéressa ensuite un moment, à une jeune fille pas très belle mais avec un charme évident qui avec élégance tournait lentement les pages de son livre au fur et à mesure qu'elle avançait dans sa lecture. Elle avait une grâce qui attira un long moment l'attention de Paloma. Cependant, le titre du livre, un roman sans intérêt duquel elle préféra détourner le regard tant l'auteur y avait mis d'inepties fit retomber tout l'intérêt qu'elle portait à cette jeune fille pourtant captivante...

Un agacement certain commençait à l'envahir quant à cette auteure de pacotille dont les livres se vendait maintenant à des millions d'exemplaires, tandis qu'un homme d'une certaine prestance faisait son entrée dans la salle. Essayant tant bien que mal de reprendre son jeu de chercher la beau moment de sa journée, elle le fixa.[right]

Invité

La bibliothèque… lieu béni… épure du savoir et de la connaissance, où la lecture et l’écriture peuvent rapprocher les gens et laisser naître et s’insérer une forme de complicité saine et silencieuse…

Arsène aimait cet endroit. Il y avait chaque fois trouvé toutes les informations dont il avait besoin, aussi bien pour étudier les grands auteurs dont il parlait en cours que pour étudier les plans d’antiques souterrains lui permettant d’effectuer d’effectuer sa petite besogne, que puis une « simple » lecture-plaisir, car, effectivement, en tant que professeur de Lettres, le Français multipliait ses lectures et recherches. D’ailleurs, dans un souci évident de bien faire, Lupin tâchait de se tenir au courant des nouveautés littéraires (même si, très franchement, la production actuelle avait parfois l’art de laisser à désirer) et pour ce faire, la bibliothèque publique de la ville constituait un atout majeur.

Celui que tous ici connaissaient sous le pseudonyme de Paul Sernine était optimiste. Il se disait qu’un jour ou l’autre verrait l’avènement de quelque auteur digne de ce nom… Ce regain d’intérêt qu’il constatait pour les mythes multiséculaires, par exemple, ça pouvait avoir du bon… Il se pourrait bien un jour prochain qu’un écrivain en herbe puisse rendre ces mythes à nouveau légers et fluides, leur donner une deuxième vie, une deuxième jeunesse qui vaille la peine et qui n’aurait rien à voir avec les romans actuels, ces feuilles de choux tout juste valables pour qu’on épluche des pommes de terre dessus.

Ces derniers temps, le gentleman-cambrioleur avait beaucoup lu d’oeuvres datant de quelques siècles. Par principe, il relisait les textes qu’il abordait aux cours, même s’il devait prendre des années pour cela, au moins il pouvait être sûr et certain d’avoir de quoi passer le temps en cas d’avaries météorologiques…

Ainsi, Arsène venait rendre à la bibliothèque les quelques ouvrages sur lesquels il avait fini de travailler : Villon, Rousseau et Molière. Pour la suite, il avait l’intention d’emprunter l’un ou l’autre Voltaire et un bon petit Diderot. Lupin déposa donc les livres qu’il rendait sur le bureau de la bibliothécaire responsable des retours, puis il alla sélectionner quelques livres dans le rayonnage de littérature française et, trois volumes sous le bras, l’homme se rendit en salle de lecture, là où il aurait à sa disposition des ouvrages de référence où il devait chercher une information essentielle, car, bien évidemment, Lupin vérifiait méticuleusement tout avant de communiquer son savoir à ses étudiants.

Il s’avança dans la salle silencieuse où régnait une atmosphère de travail plus que de détente et choisit de déposer veste, chapeau et livres sur une table où était installée une jeune fille blonde. Arsène posa ses affaires sur le coin opposé à celui où se trouvait la demoiselle, peu désireux de déranger une personne ayant certainement besoin de calme et de concentration, puis, il partit chercher l’encyclopédie des topoï romanesques (une édition vieillotte, mais très complète et pratique) et revint à sa place avec l’imposant ouvrage qu’il ouvrit à la page consacrée aux structures rimiques des romans médiévaux.