I want to exorcise the demons from your past (PV Jordy)

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Cela faisait un moment qu'elle avait commencé. Une bonne heure sûrement. Les voisins du dessous se seraient sûrement plaints s'il n'était pas 10h, et s'ils n'étaient pas au boulot. Il y a quelques jours, elle avait repensé à la fête qu'elle avait organisé chez elle quelques mois plus tôt. C'est là qu'elle avait rencontré Paul et Greg. Ils étaient d'ailleurs restés dormir chez elle, tout comme Olaf qui avait finalement arrêté de vomir des limaces. Et c'est là qu'elle s'en était souvenue.

Severus. Severus est venu lors de cette fête. Il est venu faire un tour, alors qu'elles étaient rares à Poudlard, les occasions où il quittait les cachots pour se montrer dans une soirée. Il avait toqué alors qu'elle discutait avec Olaf et Paul. La porte était à peine ouverte que déjà les insultes pleuvaient. Il n'était resté qu'une ou deux minutes, mais Tonks avait eu besoin d'un petit moment pour se remettre.

Pendant qu'elle courrait avec Paul ce matin, elle y avait repensé. Elle lui en avait parlé, en cachant les indices qui la trahiraient. Snape était quelqu'un qui avait joué un double jeu pendant leur « guerre ». Il n'avait été innocenté qu'à la fin, ce qui l'avait forcé à fuir ici pendant plus d'un an. Fuir pour ne pas être retrouvé et tué par vengeance personnelle et envie de faire sa justice. Et puis peut être qu'il s'était caché, de honte de ce qu'il avait dû faire. Respecter les dernières volontés d'un homme mourant, même si celles-ci le forçaient à ne plus pouvoir se regarder dans un miroir. Il avait tenu sa promesse, se retrouvant de cette manière hait par toute une communauté.

Paul l'avait écoutée. Avec beaucoup de sagesse, il lui avait donné son avis et l'avait conseillée. Il devait lui rendre visite. Si c'était trop difficile pour elle de tracer un trait sur tout ce qu'il s'était passé, si à cause de tout ça, elle avait du mal à s'excuser, alors les choses ne changeraient pas et jamais elle ne pourra voir en lui quelqu'un d'autre qu'un traître innocenté.

C'est pour cela qu'elle se retrouvait depuis une bonne heure, à faire les cent pas dans son appartement. Dean avait essayé de la faire parler, mais elle s'était enfermée dans son mutisme, n'en sortant seulement que pour se parler à haute voix. Oui, elle devait aller le voir, pour s'excuser. Non, elle devait attendre qu'il fasse le premier pas. Après tout, c'était lui qui s'était enfui.

Finalement elle arrêta de marcher pour se jeter et se recroqueviller sur le divan à côté de son colocataire. Dean l'avait regardée, observant avec beaucoup d'amusement son état d'esprit changer aussi vite qu'il tournait les pages de sa revue pour adultes. Il lui demanda si elle était contrariée ou si c'était seulement le fait qu'elle soit tarée qui ressortait tout d'un coup. Furieuse, elle se leva, attrapa un coussin sur le canapé qu'elle lui balança dans la tête avant d'aller chercher des vêtements dans sa chambre, pour se barricader dans la salle de bain.

Elle prit une douche rapide et se regarda dans le miroir. Tonks n'était jamais allée le voir. Pour parler de Remus, pour parler de sa trahison qui finalement n'en était pas une. Elle n'avait jamais présenté d'excuse, n'en avait jamais reçu. Elle devait régler cette histoire et le plus tôt serait le mieux. Bien décidée, elle sécha ses cheveux à l'aide de sa baguette et s'habilla. Jean, tunique violette et rangers noires transformées en petites chaussures, elle rallongea à peine ses cheveux et sortit de la salle de bain. Sans jeter un regard à Dean, elle quitta l'appartement en faisant attention à bien claquer la porte, descendit les cinq étages, alla jusqu'aux boîtes aux lettres et remonta d'un étage. Le 101. C'est là où vivait l'homme des cachots.

Elle inspira un grand coup. Vérifiant que sa baguette se trouvait bien à sa place, elle posa une main sur la poche de son jean. Elle remit ses cheveux en place avant d'arrêter de bouger. Pourquoi était elle aussi nerveuse de le revoir tout d'un coup? Sans réfléchir, elle leva la main et tapa trois coups énergiques contre le bois de la porte. Les dés étaient jetés.

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Quinze jours s'étaient écoulés depuis son agression. Jordan était sortie de l'hôpital sitôt qu'elle avait pu signer - de la main gauche - une décharge, peu soucieuse de croupir dans une chambre blanche pour une durée indéterminée. Sa main était plâtrée, elle était capable de se débrouiller seule des autres soins, elle avait donc fui pour se retrancher chez elle au plus vite. Moyennant le passage d'une infirmière et des visites régulières chez le psychologue, elle pouvait rester chez elle. Elle avait pensé que cela serait mieux. Enfin non. Elle n'avait pas pensé que ce serait mieux. Elle ne pouvait simplement pas supporter l'idée d'être hospitalisée.

Il y avait donc un peu plus d'une semaine qu'elle était rentrée. Barricadée dans sa chambre quand Severus était là, ne sortant que pour les cas d'extrême nécessité, elle s'était transformée en recluse, dormant des heures et des heures pendant la journée, assommée par des semaines de sommeil en retard et les anti-douleurs, insomniaque la nuit, tenue éveillée par des cauchemars tous plus angoissants les uns que les autres. Elle avait refusé les anxiolytiques, mais le regrettait presque à présent. Lorsqu'elle ne dormait pas, elle demeurait des heures immobile, couchée en chien de fusil sur le canapé ou sur son lit, les yeux grands ouverts fixant le vide, parfois regardant un film sans le voir, absente.

Son esprit tournait encore avec des ratés, elle avait encore beaucoup de mal à focaliser son attention sur quelque chose plus de quelques minutes et la plupart du temps c'étaient des pensées confuses et fragmentaires qui l'assaillaient. Mais lorsqu'elle voulait vraiment faire un effort de concentration, elle pouvait reprendre un raisonnement cohérent. Elle essayait de s'y forcer un peu plus chaque jour... n'y parvenait pas toujours... Il lui arrivait encore de pleurer et de sangloter, recroquevillée et le visage enfoui dans un coussin, des sanglots qui lui tiraient en même temps un rire amer. Quel cliché... Trop fière pour demander à son colocataire et amant épisodique ce dont elle avait le plus besoin et qu'elle n'était pas sûre qu'il lui donnerait : une épaule et des bras protecteurs pour, une nuit au moins, pouvoir dormir sans avoir peur...

Severus était parti assez tôt ce matin-là. Il donnait cours à un groupe visiblement particulièrement peu doué, à en croire ce qu'elle l'avait entendu pester à plusieurs reprises. Sitôt qu'il avait refermé la porte et qu'elle avait entendu ses pas s'éloigner dans le couloir, Jordan était sortie de sa chambre comme une sorte de zombie. Elle n'avait pas faim, mais savait qu'elle devait prendre plusieurs médicaments. C'était donc par raison plus que par envie qu'elle s'était arrachée à son lit. Elle se fit chauffer une tasse de thé au micro-onde, pour avaler ses médicaments. C'était à peu près tout ce que son estomac de plus en plus capricieux acceptait d'ingérer. Elle s'assit sur l'un des tabourets de la cuisine pour le boire et eut un frisson. Elle se sentait poisseuse, collante. Elle avait besoin d'une douche.

Reposant la tasse au trois-quarts vide, elle descendit du tabouret et repassa dans sa chambre récupérer un plastique pour mettre sur son plâtre. Elle en profita pour laisser ses vêtements dans le panier de linge sale. Il était temps qu'elle se change. Le plus dur serait le shampooing à une seule main, mais elle devrait pouvoir s'en sortir. Elle tira de son placard un nouveau survêtement et un débardeur, ainsi qu'un sweat. Cela ferait l'affaire. Elle voulait simplement se sentir un peu fraîche, un peu moins négligée. Elle savait que l'effort qu'elle allait fournir allait l'épuiser pour le reste de la journée. C'était déjà ce qui s'était passé les fois précédentes. Mais elle ne se supportait plus.

Lorsque l'eau brûlante s'abattit sur ses épaules, elle poussa un soupir de soulagement. Elle aurait bien sûr préféré un bain, mais avec le plâtre, c'était trop compliqué. Déjà une simple douche relevait de l'exploit. Mais elle ne pouvait tout de même pas demander à Severus de l'aider tous les jours... Elle ferma les yeux, laissant l'eau ruisseler dans ses cheveux, sur sa peau... C'était une sensation agréable, qu'elle aimait beaucoup, dont elle avait besoin. Un des rares moments où son esprit était en repos.

Elle finit par couper l'eau, après s'être longuement et soigneusement lavée, en prenant garde à ne pas faire resaigner l'une ou l'autre de ses plaies. Emballée dans une serviette, ses cheveux drapés dans une autre, elle se tint un moment devant la glace qui surmontait le lavabo. La plaie de son arcade cicatrisait lentement, mais de manière satisfaisante. Celle de sa lèvre n'était plus qu'un souvenir, tout juste une petite ligne à peine visible, les couleurs de ses hématomes étaient à présent presque toutes effacées, seule sa pommette gardait des traces plus vivaces. Elle passa une main hésitante sur ces fantômes pâles de ce qu'elle avait vécu. Elle s'interrompit en constatant que sa main tremblait et serra le poing pour essayer de faire cesser le tremblement. Puis, avec un soupir résigné, elle se détourna et ôta le plastique de son plâtre pour pouvoir s'habiller.

Elle sortit de la salle de bains et allait de nouveau s'abattre sur le canapé pour une nouvelle journée aussi morne que les précédentes, quand elle entendit frapper à la porte. Elle sursauta, surprise par ce bruit inhabituel, et son coeur fit un bond dans sa poitrine. Mais elle se raisonna. Allons, ce n'était sans doute qu'un voisin venu demander quelque chose... Elle n'en revenait pas d'être devenue si peureuse, elle qui n'avait jusqu'alors peur de rien. Ou presque. Elle alla jusqu'à la porte et jeta un regard par le judas. De l'autre côté se trouvait une jeune femme dont le visage et la chevelure violette ne lui étaient pas inconnus. Jordan eut un flash. La soirée All Souls' Night. C'était là qu'elle l'avait vue. En revanche, son nom lui échappait.

Doucement, Jordan ouvrit la porte.

Bonjour... ?

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La porte s'ouvrit lentement et avec étonnement, Tonks vit un visage tout à fait féminin apparaître. Sur une femme qu'elle avait déjà vu. Le souvenir revint très rapidement. Elle l'avait déjà vu à la soirée qu'avait organisé la résidence. La All Souls' Night. Soirée qui avait bien dégénéré d'ailleurs. Retenant un frisson, elle fit la mise au point sur celle qui devait être la colocataire de Snape. A la soirée, elle était splendide. Ses cheveux bruns étaient relevés, et sa robe semblait avoir été cousue sue elle. Elle se souvint qu'elle avait décidé de ne pas se mettre à côté d'elle pour ne pas paraître encore moins à sa place qu'elle ne l'était déjà avec sa jupe violette.

Seulement cette fois ci, elle était différente. Bien différente de celle à qui elle ressemblait lors de la soirée. Peut être qu'elle la préférait comme elle était maintenant. Au naturel. Oh, évidemment, elle était toujours aussi belle, même sans sa robe et son maquillage ce qui était assez pénible. Mais elle semblait plus abordable, plus simple et était bien moins impressionnante.

- Bonjour, je suis Nymphadora Tonks. J'habite au 503. Désolée de vous déranger, mais je voudrais voir Severus Snape. C'est un vieil ami à moi, et je voudrais lui parler.

« Ami ». Un « ami ». N'importe quoi. Elle n'avait pas pu trouver mieux? « C'est un tortionnaire ». « C'était mon professeur de potions ». « Il a des comptes à me rendre ». Enfin tout mais pas « un ami ». Le seul ami qu'il avait jamais eu, il l'avait tué. Bon d'accord... Il a des circonstances atténuantes. Et puis c'était l'ami qui lui avait demandé.

Et puis elle repéra quelque chose qu'elle n'avait pas vu avant. La colocataire de Snape -rien que l'appellation la forçait à avoir énormément de respect pour elle- avait un bleu sur la joue. En réalité, elle semblait vraiment mal en point. Pâle comme si elle n'avait pas vu la lumière du jour depuis des semaines. Ses yeux étaient éteints et soulignés de cernes immenses. Son regard se déplaça sur le corps de la femme. Ses épaules étaient voutées. Son sweat laissait apparaître un plâtre.

Tout en elle désignait le fait qu'elle avait été battue. La main abîmée, le visage tuméfié sur lequel subsistait des traces de mauvais traitements. Tonks n'avait jamais eu d'affaire de femme battue. Après tout, ce n'était pas son boulot. Mais comme tous les Aurors, elle avait suivi des cours, des formations pour apprendre à les repérer. Elle se souvenait que dans bien des cas, il s'agissait des proches, et presque à chaque fois des conjoints. Si elle vivait ici, il n'était pas dur de deviner qu'elle n'était pas mariée. Et elle vivait avec un homme...

- Désolée de vous poser une question aussi indiscrète, mais est-ce que c'est Snape qui vous a mis dans cet état?

Oui bon d'accord. Peut être qu'elle n'était pas du tout battue, qu'elle imaginait n'importe quoi. Mais si c'était le cas et qu'elle ne faisait rien? Et puis ce n'était peut-être pas non plus Snape. Quand on y réfléchissait bien, il n'avait jamais été violent envers les autres. A part peut être envers Harry, par ses paroles, mais jamais elle n'avait entendu dire qu'il avait frappé quelqu'un. Il fallait qu'elle se calme. Son inconscient voulait une nouvelle fois accuser Snape. Il n'était pas responsable de tous les maux de la Terre non plus.

Mais même si elle savait qu'elle l'accusait sûrement à tort, elle devait savoir la vérité. Elle ne pouvait pas la laisser dans cette situation...

Invité

Une visite pour Severus ? Voilà qui était pour le moins inhabituel... Mais enfin admettons, celui-ci avait bien le droit d'avoir une vie. Cependant, le terme "ami" la laissait légèrement perplexe. D'une part parce que le look de la demoiselle ne correspondait pas vraiment à celui des "amis" potentiels de son colocataire. Trop colorée, trop "jeune". D'autre part parce que le visage de la jeune femme avait eu une subtile expression contrariée quand elle avait prononcé ces mots.

Jordan s'étonna un bref instant de constater qu'elle était capable de raisonner à nouveau - même sur une question si peu importante que celle-ci. Cette constatation lui faisait plaisir,d'une certaine façon. Cela signifiait que son esprit recommençait tout doucement à fonctionner de façon plus normale. Quelque part, elle en était reconnaissante à la jeune femme, de façon indirecte. Elle eut une ébauche de sourire. Enfin ce qu'elle espérait être une ébauche de sourire.

Je suis navrée, Severus est absent pour la journée. Je crois qu'il finit les cours vers 16 heures...

Elle repoussa machinalement une mèche de cheveux de son visage. Mais la question de la jeune femme lui fit suspendre son geste. Elle jeta un regard proprement stupéfait à son interlocutrice. Pas un instant l'idée même qu'on puisse penser qu'elle était une femme battue ne lui avait effleuré l'esprit. Premièrement parce que les circonstances qui lui avaient valu ces blessures étaient à mille lieues de ces tristes considérations. Ensuite parce qu'elle ne se considérait pas en couple avec Severus. Enfin parce que s'il s'était avisé de seulement tenter de lever la main sur elle, sorcier ou non, elle lui aurait fait ravaler toute envie de recommencer, à coups de Taser s'il le fallait. Elle finit par prononcer :

Oh... non, non. Il n'a rien à voir là-dedans. Mais merci de vous en inquiéter.

Elle hésita un instant, puis une réminiscence de ses habitudes normales s'imposa à elle, comme une réflexe. Ouvrant la porte un peu plus grand, elle eut un geste pour inviter la jeune femme à entrer.

Ecoutez, Severus ne rentrera pas avant cet après-midi, mais je peux peut-être vous offrir quelque chose ?

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Un nouveau mantra s'imposa dans l'esprit de la jeune sorcière. « Ne demande pas ce qu'il s'est passé ». Elle ne devait, en aucun cas, lui poser la question. D'abord, c'était impoli, très impoli. Sa mère lui avait appris les bonnes manières. Elle la renierait si elle apprenait qu'elle avait fait une telle chose. Bon d'accord, elle ne la renierait peut-être pas, mais si elle en venait à l'apprendre, Tonks passerait un sale quart d'heure. Et ensuite, elle n'avait pas forcement envie de parler de ça à une totale inconnue. C'est vrai, elle n'était personne. Une voisine venue voir son colocataire pour régler ses comptes. Elle ne s'attendait même pas à tomber sur quelqu'un d'autre, et encore moins sur une femme. Elle avait fait son boulot, mais stop. Quelque chose de dramatique était surement arrivé, pas la peine d'en rajouter une couche.

L'invitation lui tira un sourire. C'était une occasion pour passer de « personne » à « quelqu'un ». Mais elle ne pouvait pas imposer sa présence comme ça. C'était seulement la politesse qui la forçait à l'inviter à entrer, mais elle allait encore faire sa Tonks: parler, rire, agacer. Elle n'était vraiment pas sûre qu'elle la supporte. Mais comme elle lui avait dit plus tôt, « Severus » rentrerait « de cours » vers 16 heures. Qu'est-ce que c'est cette histoire de cours? Il lui semblait pourtant être au courant. Pourquoi le fait que Snape soit aussi enseignant dans ce monde ne l'étonnait pas? Le souvenir revint à elle et elle revit Paul lui confier qu'il connaissait Snape de l'université. Ils enseignaient tous les deux.

- Je veux bien, oui. Si cela ne vous dérange pas bien sûr.

C'était sûrement la meilleure façon pour apprendre à connaître Snape. S'ils étaient aussi proches qu'elle l'était de Dean, elle serait la mieux placée pour parler de lui. Dean savait (presque) tout sur elle. Elle n'était (presque) rien à lui cacher. Ils étaient amis, et il l'avait aidée pas mal de fois au début de leur colocation. Peut être que l'impression était fausse, mais il lui semblait plus heureux que depuis son arrivée.

Comme elle lui faisait signe, elle entra, en faisant attention à ne pas passer trop près d'elle – avec elle, un accident était vite arrivé. Ainsi, c'est ici qu'ils évoluaient tous les deux. L'appartement était assez similaire au sien, finalement. Pourtant, quand on savait qui vivait là, il manquait quelque chose. Où se trouvait le laboratoire du maître des potions? Elle ne pouvait pas croire qu'il avait abandonné à ce point le monde magique. C'était son identité ça. « Je suis Severus Snape, votre professeur de potions. », « Severus Snape, maître des potions ». Laissant son regard vagabonder sur la pièce, elle remarqua une tasse sur la table de la cuisine. Apparemment elle avait déjà préparé quelque chose pour elle. La jeune sorcière leva les yeux au plafond. Boulet Tonks, boulet.

- Vous voulez que je vous aide? Je ne veux surtout pas vous déranger.

Elle ajouta à ça une joli sourire, histoire qu'elle ne se vexe pas, qu'elle ne pense pas qu'elle la jugeait incapable de préparer un thé. Elle était blessée, pas inapte. Traiter les gens comme des porcelaines n'était pas toujours la meilleure solution. Un peu d'égard ne faisait pas de mal, mais pas la peine d'en faire des masses. Si elle était comme elle, c'était la meilleure solution.

Invité

Jordan eut une esquisse de sourire et laissa passer la jeune femme, avant de refermer la porte de l'appartement. Elle lui laissa le temps de regarder autour d'elle, peut-être de chercher des traces de la présence de Severus. Machinalement, elle laissa elle-même errer son regard sur le canapé et les fauteuils de cuir noir, la table basse de bois qu'elle ne parvenait pas à identifier, le tapis, les étagères. Dans la salle commune, que possédait-elle ? La télévision. L'équipement high-tech d'une manière générale. Le secrétaire dans un coin de la pièce où elle posait son ordinateur pour aller sur internet entre deux dossiers parce que le câble n'était pas assez long pour aller jusqu'à sa chambre. Et la moitié des livres sagement rangés sur les étagères, ainsi que la totalité des dvd et cd empilés de chaque côté de la télévision. Environ 200 films, et le double de cd. Vous avez dit cinéphile ?

Quand Jordan était arrivée, son colocataire était déjà bien installé, ce qui l'avait bien arrangée, lui évitant d'amener trop de meubles. Son lit, son bureau - une grande planche sur des tréteaux - le fauteuil qui allait avec, deux étagères et ledit secrétaire, voilà en tout et pour tout ce qu'avait Jordan. Le reste appartenait à Snape - hormis les équipements de la cuisine, celle-ci étant toute équipée. Ce qui lui faisait dire que le jour où il partirait pour x raison, il lui faudrait entièrement remeubler l'appartement... Cette pensée lui tira un demi-sourire. Dieu merci, ce n'était a priori pas à l'ordre du jour.

Elle passa dans la partie cuisine de la grande pièce en repoussant machinalement les cheveux de son visage, retrouvant quelques automatismes qu'elle n'avait pas vraiment cherché à provoquer ces derniers temps. Sourire. Se redresser. Paraître aller bien, à défaut de vraiment l'être. Se forcer. Réagir. Quand elle était plus jeune, son père disait souvent que quand ça n'allait pas, la première chose à faire était de se lever et d'aller s'habiller. Et qu'ensuite... en général ça allait mieux. Ou du moins qu'on pouvait affronter la journée et penser à autre chose.

Tout en déposant sa tasse dans l'évier et en lançant la bouilloire, Jordan songea que, quelque part, cette visite impromptue n'était pas une mauvaise chose. A ne plus voir que des personnes qui "savaient" et la traitaient comme si elle était malade, elle avait fini par se laisser complètement aller. Puisqu'elle n'avait pu s'abrutir dans le travail, elle s'était laissée couler. Devoir présenter bonne figure à une étrangère était ce qu'il lui fallait. Elle eut un geste pour offrir à la jeune femme de s'asseoir, tout en cherchant dans les placards ce qu'elle avait à offrir.

Je suis désolée, je n'ai que de l'Earl Grey à vous proposer. ça ira ?

Elle se détourna pour remplir les deux tasses et en déposa une devant la jeune femme, avant de s'asseoir elle-même de l'autre côté du comptoir.

Il y a longtemps que vous connaissez Severus ?

Elle réalisa soudain qu'elle ne s'était pas présentée et tendit sa main gauche par dessus la table.

Au fait, je manque à tous les devoirs de la politesse. Je suis la colocataire de Severus. Dr Jordan Cavanaugh. Enchantée. Et désolée pour le salut peu conventionnel...

Finalement, revenir à la normale était plus facile qu'elle ne l'aurait imaginé. Moins douloureux. Elle était bien plus habituée à devoir garder la tête haute et présenter le meilleur visage possible qu'à se retrancher chez elle. Il suffisait de laisser faire les vieux automatismes et les réflexes conditionnés qui régissaient sa vie.

Invité

- De l'Earl Grey sera parfait, merci.

Comme elle l'y invitait, Tonks prit place autour d'un côté du comptoir non sans avoir jeté un dernier regard au mobilier du salon. C'était sympa. Moderne. Peut être un peu sombre à son goût. Mais bon, vu ses goûts à elle … La collection de cd lui attira un sourire. Si Dean découvrait ça, c'en était fini de la tranquillité du 101. En grand amateur de musique, de rock surtout, il passerait sa vie ici, c'était évident, dévorant les cd les uns après les autres, encore plus si c'était ceux qu'il aimait. Mais elle ne lui dirait pas. Elle était censée « bouder ». Il lui ferait certainement une remarque sur l'âge qu'elle avait, mais tant pis. Elle prenait le risque, évitant ainsi à Miss « colocataire-de-Snape » un mauvais numéro de drague

Elle la regarda évoluer dans sa cuisine. Etait ce simplement une idée ou bien tous les gens qu'elle rencontrait ici était amateur de thé? Dire qu'elle s'était mise à boire du café pour se perdre dans la masse des américains... Non pas que ça lui déplaise. Mais c'était bien trop différent de ce qu'elle était habituée à boire à tous moments de la journée. Et puis les conséquences d'un café sur son organisme étaient souvent dévastatrices pour son colocataire. Elle la remercia et saisit la tasse entre ses mains.

- J'avais 11 ans la première fois que je l'ai rencontré, et j'en ai 25 maintenant, donc oui, on peut dire que ça fait longtemps, confia-t-elle avec un sourire. Il était professeur dans l'école où j'étudiais.

Avec surprise, elle la vit tendre une main vers elle... Avant de sourire et de découvrir qui était la jeune femme en face d'elle. Jordan Cavanaugh. Un prénom plutôt masculin. Mais qui était elle pour juger les prénoms des autres, franchement...

- Pas de problème, ne vous en faites pas. On repart à zéro si vous voulez.

Elle toussota, attrapa la main de Jordan et prit une voix sérieuse qu'elle n'utilisait plus depuis qu'elle était arrivée au 109.

- Enchantée de vous connaître Dr Jordan Cavanaugh, je m'appelle Nymphadora Tonks. J'habite au 503.

Tonks aurait voulu rajouter un « êtes-vous tout à fait saine d'esprit? » mais ne le fit pas... Pour une première rencontre, c'était plutôt moyen. Même si elle avait de sacrés doutes. Mais plus elle parlait avec elle, plus elle lui semblait sensée. Peut être que « Severus » n'était pas si horrible que ça après tout... Retenant un rire, elle se dit que non, que c'était sûrement Jordan qui était courageuse... Très courageuse... Peut être qu'ils ne se voyaient jamais...

- Vous avez dit être médecin Quelle est votre spécialité? Je connais un médecin d'ici, le Dr. House. Un homme très … particulier dirons nous. Mais néanmoins très intéressant

Et plus elle restait avec elle, plus elle s'attachait à elle. Elle remarquait les efforts qu'elle faisait pour ne pas avoir l'air de souffrir, pour avoir l'air d'aller bien. Elle était bien placée pour savoir combien c'était difficile, et la trouvait d'autant plus courageuse qu'elle était une squatteuse... Elle ne resterait pas longtemps. Elle la laisserait tranquille.

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