Un "Squat" ? Non, plutôt un emménagement. [PV : Lisbeth]

Sherlock descendit les marches de l'agence immobilière d'un pas précipité. Aucun sourire apparent sur son visage, ses sourcils étaient froncés : il était contrarié. Aucun des appartements qu'on lui avait proposés ne lui convenait. Pourtant, il en était à sa troisième agence de la matinée, et il commençait à en avoir assez de ces sourires commerciaux crispés, de ces mains hypocrites qui se tendent, de ces "affaires en or" qu'on y propose. Lui n'était pas dupe. Quittant le dernier vendeur par un "Tss" méprisant suivi d'un haussement de sourcil, il décida de chercher un logement par ses propres moyens. Il serait plus efficace seul qu'en compagnie d'un individu qui ferait considérablement baisser le pourcentage de chances de trouver ce qu'il cherchait. Les immobiliers sont d'une inutilité effarante...
Marchant d'un pas décidé, il se dirigea vers le prochain immeuble sur sa route en établissement mentalement des critères de recherche. Il devait trouver rapidement un point d'encrage pour se concentrer sur l'affaire de la lettre au plus vite. Il n'avait pas de temps à perdre pour des banalités. Sans entrer dans le bâtiment, il pourrait déjà réduire ses recherches en un regard : d'abord, le quartier. Il lui fallait un endroit CALME pour réfléchir au cours de son enquête. Ensuite, la vue qu'on pouvait avoir une fois dans l'appartement. Il lui suffirait d'observer l'orientation des fenêtres depuis le trottoir. Il tenait à une vue donnant sur la rue coté entrée, un studio au pas trop exposé au soleil, encore moins à l'ombre. Il jaugea brièvement du regard l'immeuble en face duquel il se trouvait : au suivant. Il poursuivit sa route en direction du prochain bâtiment résidentiel, qui se trouvait juste derrière. Là, il se figea sur place : lui semblait idéal. Parmi les fenêtres qu'il voyait, trois des appartements correspondaient à ce qu'il recherchait : les uns au-dessus des autres, du sixième au huitième étage. Ni plus haut ni plus bas, sinon il perdrait des angles de vue s'il voulait méditer en observant la rue. Voilà, il venait de s'économiser pas moins de sept visites inutiles et s'épargner en même temps la compagnie déplaisante d'un agent qui ne serait pas parvenu à lui vendre sa plus grande arnaque immobilière. Un maigre sourire de satisfaction se dessina sur ses lèvres et il s'approcha de l'escalier avec hâte. Regardant une dernière fois les trois fenêtres pour en déterminer les numéros d'appartements des qu'il serait entré, il s'arrêta face au bâtiment, sortit un crayon et un bloc-notes de sa poche pour noter l'adresse et franchit le seuil.

Une fois à l'intérieur, il sentit le regard de la concierge se lever lentement de son journal pour le dévisager avec curiosité. Volonté de passer inaperçu le temps de faire le tour réduite à zéro. Il ne pourrait pas visiter sans se faire questionner, il n'avait donc d'autre choix que d'aborder la gardienne. Tournant les talons pour faire un quart de tour vers l'accueil, il lui adressa un sourire courtois et faussement timide. Il déchira la feuille de son bloc-notes et la tendit à la vitre, prétextant avoir fixé un rendez-vous par téléphone avec un propriétaire du sixième étage - plus il montait, moins il aurait de chances de trouver un des appartements libres. La logeuse insista pour l'accompagner en se levant lourdement de sa chaise et il la suivit docilement vers l'ascenseur avec un air toujours aussi faussement niais. Il aurait préféré l'escalier. Des que les portes s'ouvrirent, il se rua dans le couloir et s'arrêta face à la porte sur laquelle étaient inscris les chiffres 607 en noir. C'était celui-ci, il en était persuadé. Il tourna la tête avec lassitude vers la concierge qui le suivait de quelques pas.

" - Merci beaucoup, je n'ai plus besoin de vous maintenant. "

Il frappa à la porte. Pas de réponse, donc l'appartement devait être libre. Se sentant totalement effacée, la gardienne repartit sans attendre de voir si le détective obtenait une réponse. Par mesure de sécurité, il s'exclama pour lui faire croire qu'on lui avait ouvert lorsque les portes de l'ascenseur se refermèrent. Mais une fois seul, il entreprit de crocheter la serrure. Une "Entrée par effraction" ? Non, il faisait juste le tour, et il payerait plus tard s'il comptait louer ici de toute façon. Avant de tenter quoi que ce soit de vain, il posa une main sur la poignée ; la porte était restée ouverte. Pourtant il n'y avait aucun bruit de l'intérieur, aucune présence vivante détectable. Il pénétra dans l'appartement, se dirigeant machinalement vers ce qui devait être la pièce principale. C'est alors qu'il s'immobilisa net : une jeune femme était assise sur une chaise de bureau orientée vers un ordinateur portable posé face à elle. Il se tendit, incapable de dire quoi que ce soit pour sa défense. Grand silence.