De retour (avec Irène)

Severus ne pouvait plus supporter cette situation. Sans sa baguette il se sentait trop vulnérable. Et c'était une chose qu'il ne pouvait tolérer. Surtout quand on sait qu'il y a une certaine Bellatrix dans les environs. Ils ne s'aimaient pas beaucoup avant mais cela avait pris une plus grande ampleur lorsque Narcissa et lui avait contracté le serment inviolable. Bellatrix n'avait pas la moindre confiance en lui. Et finalement, elle avait bien raison. Entre temps, Severus avait bien leurré tout le monde et risquait, dans une seconde existence qu'on lui offrait, d'en subir les conséquences. D'où sa volonté acharnée de retrouver l'objet primordial de survie des sorciers.

Il décida de retourner en lieu et place de sa résurrection. La nouvelle carte du maraudeur n'était pas encore prête. Du coup, pas possible de repérer l'activité magique comme il l'aurait souhaité. Il allait devoir faire ça avec les moyens du bord autour des lieux de son arrivée impromptue. Il n'y avait rien de précis. Pas de trace, rien de probant. Il resta là à chercher pendant une bonne heure. Il se sentait de plus en plus faible et nu face à la menace éventuelle.

Fatigué de cette situation, il s'installa, agacé, à la table de ce que les moldus appelaient un salon de thé. Avec quelques monnaies qu'il avait (on ne dirait pas l'origine de cet argent), il se fit servir un thé anglais assez tassé. Il perdit son regard dans le passage des voitures. Il détestait ces véhicules roulants en métal. Aucun charme, aucune magie. Comment s'intéresser à cela ? au moins, la voiture volante d'Arthur Weasley était digne d'être considérée.

A une table non loin de lui, était installée une femme assez distinguée. Son apparence était décalée avec leur environnement, comme si elle était...anachronique. Encore plus que Severus lui-même (souvent il passait inaperçu à cause de la couleur noire et parce que la mode gothique était répandue. on le prenait souvent pour ces satanistes de pacotille, ce qui l'agaçait encore plus).

Severus avait juste voulu observer cette femme. Il n'avait pas la moindre envie de commencer une conversation avec quiconque. Il était préoccupé et souhaitait rester seul avec ses pensées. Hélas, cette femme intrigante allait interrompre ses réflexions. Sa voix n'était pas désagréable. Elle avait des manières distinguées qui nuançaient fortement avec celles de sa tranche d'âge, moldues ou sorcières. Même chez les grandes familles de sorcier, on ne retrouvait pas cette façon simple mais élégante de s'exprimer. Elle n'était pas sorcière, il l'aurait deviné. Ni un fantôme, elle était trop matérialisée. Créature magique ? Ça, par contre, c'était possible. Quant à en déterminer la race d'origine, cela serait plus difficile. au début, Severus ne voulut pas réagir. Mais la curiosité le tenaillait tellement qu'il ne put se taire plus longtemps. Il s'exprima de son timbre grave et sobre. Sans ironie, sans agressivité. Chose fort rare, à plus forte raison lorsqu'il est abordé par l'inconnu.

- Madame, votre analyse est fine. Il est vrai que je suis préoccupé. Mais je doute que mon problème vous intéresse.

Chassez le naturel, il repart au galop. L'habitude d'être solitaire et indépendant faisait que même avec la plus grande galanterie qu'il lui était possible d'avoir, il avait déclaré : "mêlez-vous de vos affaires". Changeant immédiatement d"habitude, non pas par souci de ne pas vexer l'interlocutrice, mais plutôt parce qu'il risquait de ne pas voir sa curiosité assouvie, il se corrigea.

- A moins que vous ayez quelques dons pour retrouver les objets perdus.

Peut-être qu'à deux, finalement, ils arriveraient à un résultat plus probant. S'il devait faire équipe pour retrouver sa baguette, c'était un sacrifice qu'il devait absolument faire. Il se sentait vraiment désarmé face à ce monde nouveau qu'il ne comprenait pas, trop moldu pour lui qui avait refusé leur existence jusqu'à nier son appartenance. Il était un sang mêlé, oui, né d'une sorcière et d'un moldu. A moitié sang de bourbe. Son côté moldu, trop longtemps enfoui en lui, avait refait surface à son grand désarroi tout d'abord, puis commençait à s'y habituer lorsqu'il devait traverser à un passage piéton. Et il allait devoir y faire appel aussi pour trouver un emploi. Il avait plus l'impression de vivre comme un clochard que comme un sorcier depuis
qu'il avait réssucité, le corps couvert de sang, sur un trottoir de Jersey City.

L'inconnue au style vestimentaire décidément désuet mais élégant lui proposait son aide avec plaisir. Severus était toujours étonné par les comportements spontanément positifs. Il n'avait pas vraiment l'habitude qu'on lui réponde par l'affirmative. En même temps, tout le monde n'était pas lui. Il y avait des gens bien qui étaient toujours heureux d'aider leur prochain avec le sourire aux lèvres. Comme Lily. Venant de cette dernière, Severus était prêt à accepter la pitié, l'aide, la compassion. Mais pour les autres, il ne trouvait aucune consolation et même ce comportement était presque une insulte à ses yeux. Il détestait se montrer vulnérable. Et pourtant, il venait de le faire. En demandant de l'assistance à une inconnue.
Il fallait être vraiment à côté de la plaque pour ne pas comprendre pourquoi il avait réagi ainsi. Oui, dans un certain sens, cette femme, dans son attitude, lui faisait penser à "ELLE".

A présent, il allait devoir décrire l'objet qu'il recherchait. Comment allait-il bien s'y prendre pour lui faire comprendre qu'il cherchait une baguette magique, qui ressemblait pour les moldus à une longue et fine branche d'arbre, assez ouvragée. Elle allait le classer parmi les fous sans aucune hésitation. Pourtant, il n'avait pas le choix, maintenant qu'il s'était engagé dans un partage de temps qui pourrait s'avérer fructueux pour son bien être personnel.
L'esprit de Severus avait d'abord fait l'impasse sur la première phrase de l'inconnue, avant qu'il ne fasse un retour en arrière. Drôle de formulation, à vrai dire. N'avait-elle pas dit :"les objets dérobés ne me posent pas le moindre problème, et ils sont généralement plus simples à retrouver que les objets égarés". Que voulait-elle dire derrière ses propres énigmatiques ? Était-elle une enquêtrice ou en rapport avec le milieu du crime ? Voila qui la rendait plus intéressante qu'une citoyenne lambda. Severus prit une grande inspiration, en espérant que l'ignorance moldue ne lui attirerait aucun ennui. Lorsque soudain il eut une révélation soudaine. Il avait l'avantage d’être un sang-mêlé et d'avoir donc certaines connaissances du monde non-sorcier (bien malgré lui), de sorte qu'il allait pouvoir tirer son épingle du jeu sans trop de dommages.

- Ce que je recherche ressemble à la baguette d'un chef d'orchestre. Un peu plus épaisse et grise, comme du métal. Poignée ouvragée.

Il s'était montré direct et avare en détail. Cette description n'avait pas besoin d'être plus fournie, sauf à la demande.

- Je ne sais même pas si elle était à mes côtés lorsque je suis arrivé ici. C'est un objet qui peut représenter de la valeur pour certaines personnes. Mais pour le commun des mortels, ce n'est qu'un "morceau de bois"; Rien de plus. Avez-vous une idée sur la façon de débuter cette recherche ?

Comment chercher un objet sans magie ? A part faire appel à des institutions comme la "Police" (comme s'appelaient les aurors des moldus), laisser des affiches dans les rues comme les chiens perdus (ce qui risquait attirer des personnes malhonnêtes ou éveiller la curiosité des Lestrange). Il se fit remarquer, ironiquement, que si Harry Potter le roi de l'embrouille, aurait été très capable de mener cette recherche à bien. Avec des coups d'éclats en prime.

Severus se mit à réfléchir. Les endroits où sa baguette devait logiquement se trouver ? A Poudlard. Là où il était mort. Voila qui faisait grandement avancer les choses. Il l'avait sur lui quand il était mort. Et il l'avait perdu depuis son réveil. Son réveil ? A la place Lincoln. Il était parti si vite de ces lieux pour échapper aux soupçons des pompiers suite à la découverte du sang sur ses vêtements alors qu'il n'avait aucune blessure.

- Quand je me suis aperçu de "sa" disparition, je me trouvais sur la Place Lincoln. Mais comme vous devez vous en douter...

Il afficha un petit sourire ironique.

- ...Avant de perdre mon temps à chercher ailleurs, j'ai commencé par là-bas.

Il continua sa réflexion en silence. Les trajets ? Il s'était enfui dans la rue annexe, mais il n'avait plus sa baguette à cet instant précis. Cela valait-il la peine d'évoquer ce chemin étant donné que le mal était déjà commis ? Severus posa sa main droite sur ses yeux en signe de fatigue et d'agacement, avant de prendre une bonne respiration. Si cette femme pouvait l'aider, même s'il s'agissait d'une moldue, est-ce recommandé de tout annoncer directement ?

- La dernière fois que je l'avais en main, j'étais à dans l'école où j'enseigne. L'école Poudlard, en Angleterre. Lorsque je me suis retrouvé ici, dans cette ville, j'étais entouré de personnes. Des badauds, des hommes en uniforme. Là, l'objet n'était plus à portée de main. J'ignore le trajet qui relie l’Angleterre à Jersey City.

Il fit une pause. Est-ce que cela valait la peine qu'il explique ce qu'était VRAIMENT ce qu'il appelait "l'objet" sans le citer vraiment ?Semblable à une baguette de chef d'orchestre, certes, mais plus épaisse tout de même. Et surtout, si quelqu'un la prenait en main, il y avait un risque conséquent si cela tombait entre les mains d'un sorcier. S'il s'agissait d'un moldu, aussi. Mais la coïncidence entre un geste et une parole d'un non-initié serait une coïncidence des plus fâcheuses. Pouvait-il expliquer tout cela sans risque ? Il ne connaissait pas cette femme ! Severus avait perdu sa capacité à faire confiance. Depuis très longtemps. Pouvait-il se permettre de pratiquer le culte du secret sachant qu'il en allait de sa sécurité ? Il hésitait encore.

Spoiler:

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